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Chroniques de la santé publique espagnole I: Chez le gynéco sans enlever le bas

 

Crédit: Agence efe

 

 

L’affaire de la mort du petit Rayan, et de sa maman Dalila, décédée des conséquences du virus H1N1 lance un vif débat sur l’état des hôpitaux espagnols, et le manque de moyens de la santé publique du pays. L’occasion pour moi d’entamer cette série de chroniques sur la santé publique espagnole. Choses vues (et entendues) dans les hôpitaux madrilènes.

C’est l’histoire d’une jeune femme que nous appellerons Clémentine. Cette Française, enceinte de cinq mois, vient s’établir à Madrid. En arrivant, elle décide de faire suivre sa grossesse, qui se déroule pour l’instant sans problème, par les médecins du secteur public madrilène. Première expérience, rendez-vous chez la gynécologue de l’hôpital 12 de Octubre.

 

Il faut expliquer qu’ici, le médecin est toujours assisté par deux personnes dont Clémentine ne comprend pas le rôle, et qui la fixent en se tournant les pouces. Au-dessus de la tête de la gynécologue, un crucifix ensanglanté qui donne le ton de l’entretien mené tambour battant. Bref questionnaire sur la date du début de grossesse, la consommation d’alcool ou de tabac.

 

Sur ordre de la gynécologue, l’une des assistantes tire ensuite Clémentine par le bras. Elle finit par être lancée sur la balance. Verdict, en forme de messes basses, comme si la Française ne comprenait rien à l’Espagnol : "encore une qui est bien grosse". Session prise de tension, y basta.

 

Clémentine s’attend à un examen. Sur le point d’enlever son pantalon, elle est arrêtée net, à grands cris d’orfraie, par les trois harpies : "non, non, pas d’examen plus approfondi, tout a l’air d’aller bien". Clémentine, un peu surprise, n’en tire pas de conclusion hâtive.

 

C’est au dernier rendez-vous, trois semaines avant son accouchement, que la jeune femme s’est vraiment dit que la santé publique ici ne tournait pas rond. Comme d’habitude, il y avait une dizaine de patientes enceintes jusqu’aux dents dans la salle d’attente. Comme d’habitude, il fallait expédier ces femmes en quelques minutes. Et comme d’habitude, elle n’a pas eu besoin d’enlever son pantalon.

 

Lors de ce dernier rendez-vous en revanche, la gynécologue a abordé les questions de fond : "Dites-moi, Clémentine, pour l’allaitement, vous devez vous préparer en faisant…" Clémentine la coupe : "Merci de vos explications, mais je ne vais pas allaiter".

 

- "Et sans indiscrétion, on peut savoir pourquoi ?", répond Docteur la terreur en fronçant les sourcils.

 

- "Parce que je n’ai pas envie et aussi parce que je suis travailleuse indépendante. Je dois reprendre mon travail rapidement après l’accouchement."

 

Conclusion sans appel de la gynéco, regardant d’un air complice ses deux assistantes : "Je vois, pour vous, ce sont les affaires qui comptent : ‘business is business’."

 

Clémentine s’est dit que pour l’hôpital public espagnol aussi, les affaires sont les affaires. Pas de temps à perdre ni dans les consultations, ni dans la formation psychologique des médecins visiblement. Et elle n’était pas au bout de ses surprises.

 

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