‘’Les piliers de la terre’’ de Ken Follet adaptés à la télévision

Le roman de Ken Follet, ‘’Les piliers de la terre’’ (1989) a été adapté pour la télévision. Un exercice rendu risqué par le succès de l’ouvrage.

 

Il ne pouvait pas y échapper. Vu son succès, ‘’Les piliers de la terre’’ était voué à une adaptation en images. A cause de la longueur du roman de Ken Follett – plus de 1000 pages – c’est sous forme de série qu’il a été mis en image. Mini série plus exactement, produite par les frères Scott, Tony et Ridley – le réalisateur de ‘’Gladiator’’ et ‘’Robins des bois’’. Composée de huit épisodes de 50 min ou quatre de 100 min selon les acheteurs, elle a été tournée en une centaine de jours en Hongrie et en Autriche.

 

Mini dans sa longueur mais certainement pas dans son budget ! La coproduction indépendante canadienne et allemande avait à sa disposition 40 millions de dollars. De quoi faire les choses en grand !

 

Le casting est d’ailleurs assez intéressant, Rufus Sewell (Dark City), Ian McShane (Pirates des Caraïbes 4), ou encore Matthew McFadyen (Robin des Bois). Mais le problème reste toujours le même, chacun des acteurs saccage l’image que le lecteur s’était fait des personnages.

 

La réalisation est parfois assez impressionnante. Les batailles et les paysages sont magnifiques. Mais elle est parfois trop impressionnante : l’image de fin, celle qui montre la cathédrale de Kingsbridge achevée a l’air si fausse qu’on a envie de crier : tout ça pour ça ? La construction est immense mais c’est un mastodonte. Et puisque nous sommes dans une fresque historique, imaginer qu’un tel bâtiment puisse être construit en 30 ans est une hérésie. Il a fallu près de 200 ans pour construire Notre-Dame de Paris telle qu’on la connaît aujourd’hui !

 

L’histoire réécrite

 

De manière générale, la minisérie a joué avec le temps, bien plus que le roman. Ken Follet ne s’intéressait à la politique de l’Angleterre du XIIème que pour les besoins de son livre. L’adaptation fait de la guerre civile une histoire parallèle. Et les parallèles sont d’ailleurs souvent illustrés de manière assez kitsch, comme les mariages d’Aliéna et Alfred et celui de William et son épouse (on en oublie le nom car son personnage est beaucoup plus inconsistant dans la série que dans le roman).

 

Plus décevant encore. Alors que l’Histoire est au cœur de la série, il n’est pas fait mention de l’assassinat de Thomas Beckett, alors qu’il a toute sa place dans le roman.

 

L’adaptation ne prend pas ses aises qu’avec la grande Histoire, elle en prend aussi avec l’histoire de Ken Follet. Certains passages ont l’air claqué sur le livre, d’autres en revanche manquent cruellement au récit. On ne s’intéresse que très peu, par exemple, au fils abandonné de Tom Builder. A la fin de la série, il est même totalement oublié ! Jack et Aliéna vivent ensemble, sous le même toit, sans être mariés (Aliéna et Alfred n’ont pas pu annuler leur mariage). Ils vivent donc dans le ‘’péché’’ tout en étant amis avec le prieur Philip ! Dans le livre, ils n’habitent pas ensemble et c’est une cause de tensions dans le couple au point de générer un gros rebondissement dans le récit ! Chose totalement oubliée dans la série.

 

Des lourdeurs contournées

 

Mais la série permet aussi d’éviter certaines des longueurs du roman. L’enfance du prieur Philippe, par exemple, n’est évoquée que par une phrase alors qu’elle coure sur des pages et des pages dans le livre. On peut le regretter, mais la série fait aussi l’impasse sur tous les détails architecturaux qui sont légions dans le roman. La création de l’art gothique tient une place centrale chez Ken Follet, mais n’existe que sous les formes des gargouilles que Jack sculpte dans la série !

 

En prenant des largesses avec l’histoire, l’adaptation tue notamment des parallélismes et des symboles importants. Le père de Jack n’est pas pendu mais brûlé vif. Il n’y a donc aucun écho avec la mort de William. Sa mort justement n’a pas valeur de vengeance dans la série, alors qu’elle l’est à double-titre dans le roman. Une des raisons qui pourrait expliquer ce choix éditorial de la part des producteurs de la série est qu’ils ont voulu la rendre ‘soft’. Elle a été tournée avant d’avoir trouvé acheteur, il fallait donc la rendre la plus lisse possible.

 

En somme, la série décevra ceux qui, parmi les plus de 20 millions de lecteurs à travers le monde, sont des puristes du roman. Mais l’adaptation n’est pas désagréable à regarder. Sa brièveté est un atout que la série ‘’Les Tudors’’ par exemple n’a pas. Et l’histoire de Ken Follet, malgré les changements qui lui sont apportée, reste passionnante.

 

Canal+ a acheté les droits de la série et devrait la diffuser début 2011. Vu la débauche de publicités que la chaîne cryptée met en branle à chacune de ses nouvelles séries, on n’a que peu de doute sur le succès que ‘’Les piliers de la terre’’ rencontrera en France. A quand l’adaptation de la suite du roman : ‘’Un monde sans fin’’ ?


mbillon@france24.com

 

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