"L'Hadopi protège les artistes qui gagnent déjà beaucoup d'argent"

Igor Stanislas, casquette de grand-père sur la tête, et Manu Mac Manus, petite barbe et cheveux longs, se connaissent depuis 30 ans. Les deux compères sont unis par une même passion : la musique. Il y a bientôt quatre ans, ils ont fondé ensemble le groupe de folk pop Igor and the hippie land.

 

Côté politique, les deux musiciens connaissent déjà la chanson et ne se passionnent pas vraiment pour la campagne présidentielle. "On a l’impression que les politiques s’envoient des piques entre eux mais que les problèmes de fond ne sont pas abordés", regrette Manu. L’élection ne trouve pas plus d’écho auprès d’Igor : "Je suis bien obligé de suivre la campagne malgré moi : les médias nous en parlent tout le temps ! Mais je ne sais pas encore pour qui je vais voter. C’est une mascarade tout ça." Et de plaisanter : "C’est presque rock n’roll mais ça ne me touche pas".

 

Pourtant s’il y a bien un sujet politique qui intéresse le monde de la culture, c’est le piratage sur Internet et la fameuse Haute autorité de lutte contre le téléchargement illégal (Hadopi) qui a été mise en place pour tenter de résoudre cette question (lire encadré ci-dessous). Pour Igor, pas de doute : "L'Hadopi protège les droits d’auteur, alors oui c’est une bonne chose. Après, il faut être réaliste et vivre avec son temps. Les jeunes aujourd’hui n’écoutent plus que du MP3, ils téléchargent leur musique sur Internet et on ne peut pas être derrière chaque môme", dit-il un peu dépité.

 

Manu, lui, apporte une nuance : "Évidemment qu’il faut protéger les droits d’auteur. Mais l'Hadopi protège essentiellement les grandes entreprises internationales de musique. Le téléchargement illégal concerne surtout les artistes qui vendent déjà beaucoup de disques et qui gagnent beaucoup d’argent". Et d’ajouter : "Pour les petits artistes comme nous, le téléchargement a l’avantage de nous faire de la publicité gratuitement. La difficulté avec l'Hadopi est donc de trouver le juste milieu…".

 

Écoutez Manu à propos de l'Hadopi :

 

 

 

Comme dans chaque campagne, des artistes s'engagent aux côtés de candidats à la présidentielle. On a ainsi pu voir Yannick Noah ou encore Benjamin Biolay aux meetings de François Hollande tandis que Johnny Hallyday et Mireille Mathieu affichent cette année encore leur préférence pour Nicolas Sarkozy. Une enquête Harris Interactive pour VSD réalisée du 1er au 5 mars 2012 montre qu’une majorité de Français (71%) considère que le soutien d'un artiste à un candidat à l’élection présidentielle est "plutôt une mauvaise chose pour l'artiste".

 

Manu est catégorique sur la question : "Si les artistes veulent s’engager, ils n’ont qu’à le faire dans des associations ou dans l’humanitaire. Regardez Bruce Springsteen aux Etats-Unis. Il y a quatre ans, il a publiquement soutenu Barack Obama. Cette année, il refuse de prendre part à la campagne car il a bien compris que c’était un cercle vicieux, un piège. Mais on sait très bien où va la compassion de Springsteen, il le dit dans ses chansons depuis longtemps. Un artiste peut être engagé sans avoir à prendre position pour un parti politique".

 

Igor partage l’avis de son ami. "Les chanteurs qui s’engagent derrière un candidat sont ridicules, assène-t-il. Ces artistes viennent pour le peuple mais ils vivent à New York ou en Suisse et après ils viennent donner des leçons ! Je crois que certains s’en mordent les doigts ! C'est ridicule. Ils sont manipulés par les partis."

 

Écoutez Igor à propos des artistes qui s'engagent aux côtés de candidats à la présidentielle :

 

 

À la question "Si vous étiez président, que changeriez-vous ?", les deux comparses font des réponses pour le moins étonnantes et très loin de l'univers de la musique – "On est en France, les gens qui travaillent dans le monde artistique touchent des subventions du ministère de la Culture, en tout cas les compagnies établies, donc on ne va pas se plaindre", dit Igor dans un rire alors que Manu explique que "l’art n’a rien à attendre d’un président ou d’un gouvernement car l’art est libre".

 

Pour Manu, l’important est de s’attaquer à la pollution atmosphérique. "Si j’étais président, je ferais en sorte qu’il n’y ait plus que des voitures électriques", dit-il. Igor, lui, voudrait "accorder plus d’importance à la cause animale". "On habite dans l'un des pays où il y a le plus d'animaux mais personne n'en parle", explique le musicien qui soutient l'ONG WWF.

 

Ecoutez ce que Manu et Igor feraient s’ils accédaient à la magistrature suprême :

 

 

Alors que près de 26 % des Français déclarent télécharger de la musique, la loi Hadopi, votée en 2009, a pour objectif de lutter contre le téléchargement illégal d’œuvres soumises à droits d’auteur et de protéger les ayant droits, c’est-à-dire les sociétés sans l’accord desquelles il est interdit de reproduire toute œuvre artistique (par exemple la Sacem). La loi Hadopi concerne aussi bien les livres que la musique ou encore les vidéos.

 

La loi Hadopi tire son nom de l'institution qu'elle met en place : la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet. Cette Haute autorité a pour mission de récupérer les coordonnées des internautes pirates auprès de leur fournisseur d’accès Internet  pour actionner un dispositif de réponse graduée.

 

Quant un pirate est pris en faute, un premier mail d’avertissement lui est envoyé. S’il continue de télécharger et ignore la première alerte, il reçoit dans les six mois un deuxième avertissement. La troisième étape de cette réponse graduée peut intervenir dans un délai d’un an après le deuxième avertissement. Un dernier courrier est envoyé informant l’internaute qu’il pourra être poursuivi en justice. Hadopi peut alors choisir de transmettre le dossier au parquet ou non, en fonction de la gravité des faits reprochés. Mais seul le juge peut décider d’une sanction.

 

L'émission Tech 24 fait le point sur l'Hadopi :

 

 

 

Retrouvez tous les billets de "Si j'étais président..." en cliquant ici.

 

Remerciement à l'atelier show-room Dupont des Arts pour nous avoir accueillis. Bande-son: "I love Kennedy" et "Country Boy", Igor and the hippie land, bientôt dans les bacs.

 

Crédit photo : Sophie Pilgrim

 

 

 

 

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