Ibrahim Maalouf, le grand mix

A priori, aller à un concert de trompette ce n’est pas tous les jours. A moins que cela ne soit le concert de fin d’année du petit frère qui nous a rabattu les oreilles toute l’année avec des couacs en répétant son solfège. Mais, avec Ibrahim Maalouf , pas de fausses notes, de l’inattendu et du plaisir à prendre, simplement.
D’abord il y a « Beyrouth », gros morceau de dix magnifiques minutes pendant lesquelles Ibrahim Maalouf nous raconte son retour sur  sa terre natale, le Liban. Où comment à l’âge de 13 ans, il découvre un pays qui se relève à peine de la guerre civile. Véritable conte musical, au fil des notes, on imagine parfaitement l’adolescent, un peu hagard, déambulant dans les rues et accueillant dans la douleur ces images de murs criblés de balles, « comme à la télé » nous dit-il. L’imaginaire fonctionne à plein tube et l’on saisit alors toute la colère qui s’empare de ce gamin blessé : « Beyrouth » se termine dans une course effrénée, glissant subtilement dans une énergie beaucoup plus rock, voire métal, aux influences « Led Zeppelinesque » de son propre aveu. Un témoignage, sonore, bouleversant, d’une plaie béante propre aux libanais qui se sont tant déchirés. Malgré une mélancolie délicieuse, l’énergie libératrice nous emporte jusqu’à la dernière note. On aurait presque envie de se jeter dans la fosse dans un pogo adolescent. Oui mais voilà, le public français est ce qu’il est, c'est-à-dire assis pour écouter de la musique !
Jogging et sweat à capuche, rien de très conventionnel, mais au diable les traditions, l’audacieux Ibrahim Maalouf mélange de toute façon tant de genres musicaux qu’il serait bien curieux de le découvrir habillé en pingouin. Il faut dire que sa décontraction est somme toute parfaitement justifiée : En répétant les morceaux de sa tournée, il s’est rendu compte qu’il n’était jamais aussi à l’aise qu’en jouant en pyjama. Mais l’homme est poli, il nous a tout de même épargné ses habits de nuit ! Il faut dire aussi qu’Ibrahim Maalouf ne manque pas d’humour. Pour chaque composition, une histoire. Une histoire du quotidien, son histoire, subtil mélange de bonheurs, d’introspections et autres blessures liées à son pays d’origine le Liban.
De ses influences musicales, il y a bien sûr l’héritage oriental de son papa, Amin Maalouf, non moins célèbre trompettiste libanais qui lui a tout appris (Ibrahim Maalouf est le seul trompettiste au monde à jouer avec la « trompette à quarts de tons », inventée par son père dans les années 1960).  Mais Ibrahim Maalouf, c’est aussi ce trentenaire, élevé en France avec tous ces artistes qui ont marqué sa génération. Le roi de la pop, Michael Jackson, fait une incursion avec une superbe reprise de « They don’t care about us ».
Le reste de la formation qui l’accompagne nourrit sa recherche musicale. Mélange de musique arabe et de sonorités occidentales et contemporaines, six bonhommes composent la formation ce soir là : basse, guitare, batterie, clavier et même un deuxième trompettiste qui parfois troque son cuivre pour une flûte traversière ou une cornemuse. La complicité est évidente et tout ce petit monde dégage tout simplement une énergie débordante.
C’est tout en pudeur qu’Ibrahim Maalouf évoque également sa paternité dans « Lily will soon be a woman ». En pleine répétitions avec Vincent Delerm, avec qui il a longtemps collaboré, le trompettiste apprend qu’il va être papa et compose alors ce titre auquel il invite le public a participé en fredonnant la mélodie principale. Quatre parties, quatre étapes de la vie d’une femme en devenir, toujours aussi magnifiquement racontée.
Et parce que l’homme sait manifestement bien s’entourer,  il invite le rappeur Oxmo Puccino (dont nous avons déjà parlé ici) à lui écrire un texte, qui donnera « Douce ». Ode magnifique à la beauté, dédiée à sa mère, Nada Maalouf, pianiste.
Un bien bel album qui laisse place désormais à sa dernière livraison, « Wind » qui sort ces jours-ci, et que je ne saurais que trop vous conseiller si vous avez la curiosité et l’envie de découvrir un univers aussi riche et généreux que celui d’Ibrahim Maalouf.

 

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1 Comments
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