A la découverte de la culture Afrikaans


Marita, Ann et Nohline, fondatrices de la table "Pienk Kerk" à Johannesburg (E.Versace/ France 24)
 

Lorsque j’ai lu ce dépliant proposant un dîner typiquement Afrikaans, je ne pensais pas trouver derrière un pan entier de la culture sud-africaine. Nohline, l’une des deux fondatrices de la table « Pienk Kerk » littéralement « L’Eglise rose », vient me chercher à mon hôtel, direction Linden, ancien quartier blanc ouvrier dans la banlieue de Johannesburg. Premier arrêt à la boucherie où l’on trouve les immanquables Boerwors (« saucisse fermière »), bilton (viande séchée), saucisse de kudu et de springboks, les antilopes sud-africaines.  Puis direction épicerie indienne pour les épices et supermarché pour le complément. La cuisine traditionnelle des Afrikaaners ressemble un peu à leur langue. Incompréhensible au premier abord, on pense alors qu’il s’agit du flamand, de l’allemand. Puis on s’aperçoit qu’il s’agit des deux. Si on ajoute à ça une pointe de malais et de zulu, l’on obtient ce que l’on appelle la culture Afrikaans.
 


Boucherie à Linden, banlieue de Johannesburg (E.Versace/ France 24)

 

 

Nohline et Marita, l’autre cuisinière de l’équipe, n’ont pas de tabous. Question cuisine ou questions histoire, elles n’hésitent pas donner leurs recettes ou leur version de la sombre histoire des Afrikaaners dans ce pays. « Pour la génération des quarantenaires et des cinquantenaires, l’apartheid était quelque chose de normal à l’époque. Puis en grandissant, lorsque nos frères et cousins étaient enrôlés de force dans l’armée durant les « Bush War », certains d’entre nous se posaient des questions. « Est-ce que cette situation est normale ? Pourquoi lutter contre des gens que l’on côtoie ? » A la fin de l’apartheid, familles entières et amis d’enfance se sont déchirés. Si certains sont restés coincés dans cette époque, d’autres veulent aller de l’avant. A quoi sert-il de penser qu’on reviendra un jour en arrière ? » Nohline et Marita sont comme ça : brut de décoffrage, honnêtes et têtues à la fois.  
 
Lorsqu’elle ne cuisinepas, Nohline dirige une association de réintégration d’anciens prisonniers livrés à eux-mêmes après leur libération et qui n’hésitent pas à récidiver. Marita s’occupe des femmes âgées infectées par le sida, le meurtrier silencieux de ce pays. Deux femmes de courage et de détermination qui pensent également qu’il est important de protéger leur culture en voie de disparition. « Nos enfants préfèrent cuisiner français, italien, portugais. La cuisine afrikaans n’est plus à la mode. » Ces gardiennes du patrimoine ont alors décidé il y a deux ans de louer cette église méthodiste construite au début du siècle dernier et de proposer des plats typiquement Afrikaans aux locaux et aux touristes pour perdurer leur culture culinaire.
 


Marita et sa fille adoptive Stéphanie (E.Versace/ France 24)

 

 

 

En cuisine, les racines Boers des deux femmes remontent vite à la surface. Les recettes et les produits d’antan, leur rappelle leurs années passées dans les champs du Free State ou du KwaZulu-Natal. Une vie dure et sans répit, un far-west africain où l’individu se perdait dans l’intérêt de la ferme. Mais la cuisine issue de cette culture est pourtant plus variée que l’on ne pourrait le croire. Epices indiennes et san (maïs blanc), noix de pecan et dates se marient aussi bien que les couleurs de la nouvelle république sud-africaine. Arrosé d’un vin du Cap, la queue de bœuf aux épices malaises ou la tourte du poisson « snoek » méritent autant d’intérêt que d’attention à ces Afrikaaners, fiers de l’être mais qui ont pris le pari qu’un meilleur lendemain était possible grâce à l’ensemble des nations sud-africaines.

 

 

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