Far Cry 3 : "la violence doit être contextualisée"

Violence sans conscience n'est que ruine du gamer. Far Cry 3, dernier opus de la franchise de FPS (First person shooter) d'Ubi Soft, est un travail d'équilibrisme fascinant autour de la question : "à quel point peut-on aller trop loin dans un jeu vidéo ?".

 

Ce titre, qui sort le 28 novembre, n'est pas le premier à faire son beurre de l'accumulation de scènes de meurtre de 1001 manières tout en essayant d'instiller un constant sentiment de malaise chez le joueur. Mais Far Cry 3 y arrive probablement beaucoup mieux que bien d'autres jeu où les développeurs confondent contenus matures avec accumulation d'hémoglobines.

 

Sur l'île paradisiaco-infernale où l'action se déroule, le joueur ne se retrouve pas dans la peau pixélisée de l'éternel super-héro vidéoludique qui à l'instar d'un James Bond survit au canardage de 300 méchants sans le moindre effet sur sa coiffure. Dans Far Cry 3, le personnage principal est un vulgaire touriste qui pensait prendre du bon temps sur une plage digne d'une carte postale.

 

Du coup, le rapport entre le joueur et celui qu'il incarne est plus proche de l'identification que du transfert. La violence qu'il exerce ou subit peut donc être perçue bien plus personnellement. Après tout, un super-héro, ça n'existe pas et il est bien plus facile d'établir une distance par rapport à ce qui lui arrive.

 

 

 

C'est pourquoi le rapport de Far Cry 3 avec la violence peut être bien plus dérangeant que dans un jeu où il suffit de faire exploser un monstre après l'autre. Henri-Philippe Guay, responsable de la marque Far Cry pour Ubi Soft, explique à FRANCE 24 la démarche des développeurs dans le jeu.

 

FRANCE 24 : Quelle sensation vouliez-vous faire ressentir aux joueurs avec Far Cry 3 ?

Henry-Philippe Guay : Nous voulions qu'il ressente des sensations brutes, les plus proches possibles d'une expérience réelle. C'est pourquoi il était important que le personnage ne soit pas un super-héro. Toute l'aventure a été conçue autour du sentiment de malaise qui doit étreindre le joueur au fur et à mesure qu'il découvre à quel point les habitants de l'île sont fous.

 

FRANCE 24 : Comment fait-on pour que des joueurs ressentent devant leur écran de telles sensations ?

H.-P. G. : Il faut que ce qu'il voit à l'écran leur paraisse le plus crédible possible. Pour ce faire, nous avons beaucoup insisté sur le jeu d'acteur. Ainsi, au lieu de remettre un script à celui qui incarne Vaas [le grand méchant du jeu, NDLR] pour lui dire comment jouer son rôle, on l'a laissé faire. Finalement la folie qui transparaît à l'écran a été capturé alors que l'acteur était particulièrement fatigué et s'est totalement lâché dans sa performance.

 

FRANCE 24 : Au delà du malaise, c'est aussi un jeu très brutal, est-ce qu'il y a une ligne rouge à ne pas dépasser que vous vous êtes tracée ?

H.-P. G. : Pas vraiment. Tout le contenu mature de Far Cry 3 est contextualisé, il a une raison d'être scénaristique très précise et justifiée. Il me semble qu'à partir de là, le joueur peut la relativiser. L'écueil classique à éviter est de montrer du sang pour le plaisir de montrer du sang. En ce sens, c'était ça notre ligne rouge.

 

FRANCE 24 : Vous parlez de contenu mature quand d'autres évoqueront de la simple violence... pourquoi cette réticence à appeler un chat un chat ?

H.-P. G. : Notre industrie est encore jeune, souvent mal comprise par le grand public et donc critiquée pour ce que j'estime être des mauvaises raisons. La question de la violence est très sensible et je pense que nous avons une réticence à en parler parce que c'est un concept fourre-tout qui peut faire croire qu'on se complait dans ce registre. Alors qu'en fait, elle sert le plus souvent un but. C'est pourquoi, le jeu vidéo doit encore faire d'énormes efforts de pédagogie pour expliquer notre démarche. Mais vous avez raison, il s'agit de violence.

 

FRANCE 24 : Contrairement au cinéma où le spectateur est passif, dans le jeu vidéo, il y a une vraie interaction ce qui peut changer le rapport à la violence à l'écran. Comment abordez-vous cette spécificité lorsque vous développer un titre comme Far Cry ?

H.-P. G. : Il nous faut constamment savoir comment les joueurs risquent de réagir à ce que nous mettons en place comme situation dans le jeu. Pour ce faire, nous avons sollicité à plusieurs reprise des retours de testeurs qui correspondaient à notre avis à la population type de joueurs d'un titre comme Far Cry 3, c'est-à-dire plutôt masculins et habitués à jeu de tir.

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